LETTRE DE AMIN ZAOUI au PRÉSIDENT A.BOUTEFLIKA

Lettre de l’heure zéro du vendredi 01 mars 2019

Monsieur le Président, bonjour

Monsieur le Président, d’avance, je sais que vous ne lirez pas cette lettre, bien que j’aie insisté qu’elle soit brève afin de ne pas prendre de temps court qui vous reste.

Je sais que vous ne la lirez pas, bien que vous ayez régenté ce grand pays de 40 millions d’habitants pendant tout un mandat présidentiel et un peu plus par « correspondance » par lettres, par des pseudo- envoyés spéciaux ! Au point où quelques uns de votre sérail vous ont qualifié, vous aussi, d « Envoyé d’Allah».

Je vous écris et espérant que ma lettre sera lue, au moins, par ceux qui sont chargés d’écrire les lettres en votre nom et par ceux qui croient que vous êtes l’envoyé de Dieu.

De l’islamisme…

Monsieur le Président, ce grand peuple vous a bien accueilli lorsque vous êtes arrivés au pouvoir, c’était au siècle dernier ! À cette époque, vous avez suscité de l’espoir et de respect, dans une société qui a perdu le sens du rêve le long d’une décennie noire et sanglante. Bien que vous n’étiez dans votre démarche que la poursuite du travail héroïque déjà entamé par l’ancien Président démissionnaire Liamine Zeroual, à savoir la loi de la Rahma, la miséricorde.

Monsieur le Président, vous êtes venus avec l’idée de réconcilier les Algériens, selon vos propos : les barbus(les islamistes) avec les porteuses des Mini-jupes (les modernistes). Mais vous voilà à l’heure de votre départ, volontairement ou par la force, nous assistons au retour du parti islamiste fasciste et le projet de l’édification d’un Etat civil et contemporain, l’Algérie de la citoyenneté, n’est qu’illusion politique qui a duré de vingt ans.

De la dignité…

Monsieur le Président, vous êtes arrivés au pouvoir au cours du siècle dernier ! Vous occupez ce poste depuis vingt ans. Et vous en voulez plus ! Longtemps, dans vos discours fleuves, vous aviez dit que vous êtes venus pour le rétablissement de la dignité des Algériens. Vingt ans plus tard, où sont-ils l’honneur et la dignité de ces Algériens, Monsieur le Président ? 

Monsieur le Président, celles et ceux qui sont nés au cours de vos 20 années de régence royale et absolue, donnent leur corps et leur âme proie (en harragas) aux poissons de la Méditerrané, celles et ceux de nos meilleurs cadres immigrent au Canada et ailleurs …

Monsieur Président, vous êtes venus au pouvoir, c’était le siècle dernier, au moment où la peur gagnait les Algériens, et vous le quittez, forcé ou volontaire, et la peur persiste dans le pays. 

Monsieur le Président, vous êtes arrivés au pouvoir, le siècle dernier, certes les caisses du pays étaient vides. Mais, par chance, la conjoncture économique mondiale, marquée par la hausse des prix du pétrole et du gaz fut une échappatoire financière inégalée qui a réconforté votre régence royale, 20 ans durant. Et vous voilà, vous quittez le pouvoir, forcé ou malgré vous, et les coffres-forts du pays sont vides ! 20 ans que du vent !

De la corruption…

Monsieur le Président, vous êtes arrivés au pouvoir, et avec la complicité des partis corrompus, la Constitution a été violée, vous avez ouvert les mandats présidentiels pour régner à vie, en roitelet. Et ainsi nous sommes revenus au culte de la personne. Vous avez le mérite maudit d’avoir créé, et pour la première fois dans l’Histoire de ce pays, créé le système de « Al Makhzen » algérien ! Une création diabolique !

Après la corruption des partis, votre main, M. le Président, s’est étendue sur le peuple, ou du moins sur une partie de ce peuple. Avec un soutien agricole suspect, les pseudo-paysans sont devenus corrompus, une terre qui jadis nourrissait l’Europe, s’est vue aride et délaissée. Les milliers de projets de logements dortoirs destinés au nécessiteux, ne respectant aucune esthétique de l’urbanisation moderne, et ne sont qu’un moyen pour acheter le silence politique et la soumission.

Monsieur le Président, Oui, une grande partie de la population a été corrompue par l’argent du trésor public. L’argent octroyé aux jeunes sous forme de prêts n’était qu’un investissement chimère.

Monsieur le Président, vous êtes arrivés au pouvoir au siècle dernier et la presse écrite était en bonne santé ou presque, et vous avez commencé à la souiller et usant de « l’argent de la publicité ». Ainsi, quelques bons titres ont résisté d’autres sont partis, et les opportunistes ont pris le relais. Des chaînes de Tv privées sont apparues. Les algériens ont accueilli ces écrans avec bonheur, mais vite ces chaînes sont devenues, elles aussi, des sacs pour amasser l’argent de la publicité, de réclame, en échange d’un complot contre l’intelligence du peuple, et pour la généralisation de la bêtise au nom de la religion, au nom du charlatanisme, et au nom du silence idéologique d’idiotie complice.

Monsieur le Président, vous avez voulu construire des institutions et un pouvoir politique sur la base de l’obéissance totale, non pas sur la base du droit et de la citoyenneté. Une fois tombé malade, ces institutions et ce pouvoir politique que vous aviez confectionné selon votre narcissisme politique, l’envoyé d’Allah, eux aussi sont tombés malades, comme vous.

L’heure zéro…

Mais ce qui reste de ce grand peuple, épargné de la corruption, est sorti dans la rue. C’est l’heure zéro ! L’heure a sonné !

Monsieur le Président, maintenant, vous et votre régime politico-financier dans son intégralité, vous avez devant vous une seule issue: le retrait ou la ruine du pays. 

Monsieur le Président, L’Histoire récente nous rappelle la fin tragique de certains régimes et les dirigeants qui les ont enfantés ; les tyrans d’Europe de l’Est, ceux du monde arabe et d’Afrique du Nord, ont tous connu une fin tragique.

Monsieur le Président, votre retrait est la dernière issue, le dernier honneur que ce peuple peut vous offrir.

Monsieur le Président, quand vous êtes arrivés au pouvoir, le siècle dernier, vous aviez déclaré à maintes reprises : « je ne veux pas être un trois-quarts du président » alors, qu’aujourd’hui 20 ans après, vous quittez ce poste en un président « fantôme » !

Vive l’Algérie libre !

Amin ZAOUI écrivain et universitaire


Lire aussi : Honte à toi Bouteflika (s) / par Kamel Daoud

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